Distance : 19,1 km
Ascension : 500m
Descente : 481m
Hier soir, je me suis endormie tôt. Mais je suis brusquement réveillée vers minuit, par un torrent de pluie qui s’abat sur ma tente. Un déluge impressionnant ! Je crois que je n’ai jamais entendu un bruit aussi assourdissant causé par la pluie ! J’ouvre ma tente : tout est blanc dehors. On ne voit plus la mer, plus la côte, à peine à quelques mètres. Je n’ai jamais vu ça ! Je referme mais je n’arrive pas à me rendormir. En plus de la pluie, le vent s’est levé et souffle par rafale. Je commence à me demander si ma tente va tenir… A un moment, je range même mes affaires en vrac dans mon sac et je me tiens prête à partir et à aller me réfugier dans les toilettes publiques à l’entrée du village, si ma tente lâche. Mais on dirait qu’elle tient le coup et je finis par me rendormir.
Quand le réveil sonne, il ne pleut pas. J’ouvre tout de suite la tente, curieuse de voir la couleur du ciel… Tada… !!! Grand bleu ! A peine quelques nuages qui viennent lécher le sommet des montagnes. Incroyable écosse !
Je retourne dans ma tente et je rassemble mes affaires. J’entends alors une vache meugler. Le troupeau que j’ai aperçu plus loin a dû se rapprocher pendant la nuit. Mais alors que j’ai le nez dans mon sac, je vois tout à coup une ombre se dessiner sur la paroi droite de ma tente. Gigantesque ! Un eombre accompagné d’un bruit de pas, lourds, lents. La vache est juste à coté ! Je sors de la tente et tombe nez à nez avec elle. Je lui fait signe de partir. En me voyant, elle sursaute, surprise que je sois aussi proche d’elle. Elle me regarde pendant quelques secondes. Et s’éloigne juste après. Une bonne chose… Mais ce n’est pas tant cette vache que les petits veaux du troupeau qui m’inquiètent. La vache, il suffit qu’elle te voit pour partir. Les veaux, eux, ils sont tous fous, jouent, sautent un peu partout. Il ne manquerait plus qu’ils atterrissent sur ma tente ! Heureusement, ils suivent la vache qui s’éloigne et tout ce petit monde retourne un peu plus loin, avec le reste du troupeau.
Je me dépêche quand même de finir de ranger mon sac et de plier la tente. Des fois que les vaches reviennent en groupe… Je suis prête, je pars. Je passe prendre de l’eau à l’entrée du village et je prends la route en direction de Glasnakille, un petit village de l’autre coté des collines. Je suis la route mais je ne croise aucune voiture : Glasnakille est un cul de sac, la route s’arrête ici. Donc à part pour les habitants, il n’y a pas de raisons d’emprunter cette route. Arrivée au village, je bifurque sur un chemin qui remonte le long de la côte, vers le nord.
Il passe le long de prairies ou de forêts, se hasardant même parfois dedans. Il ose aussi traverser des propriétés privées où les randonneurs sont toutefois les bienvenus.
L’étape est très agréable. Chemin facile, ça fait du bien, et paysages paisibles. En route, je passe devant un champ où il y a deux highlands, des vaches écossaises.
Je m’arrête quelques instants pour les prendre en photo, mise en confiance par la clôture qui me sépare d’elles …Mais en repartant, je remarque que la clôture est complètement détruite un peu plus loin. Et complètement inutile ! Heureusement que les bestioles ne sont pas nerveuses… Elles ont de bien belles cornes quand même.
Je continue en direction des montagnes, en suivant un chemin conforme aux standards écossais : trempé et boueux. A ceux qui penseraient qu’il suffit de se décaler un peu, sachez que l’herbe aux alentours est également gorgée d’eau.
Je traverse une forêt avant d’arriver sur une route qui suit de très près le rivage.
Je vais la suivre sur une petite distance. Face à moi, toujours ces montagnes. Mon objectif. Je dois passer près d’elles avant d’arriver au village de Torrin.
Cette fois, la route est un peu plus passagère, surtout à partir de Kirkibost. C’est en effet l’une des seules à relier les différents villages de la région. Comme toujours, à chaque fois qu’une voiture arrive, et la route n’étant pas très large, je me décale sur le coté pour les laisser passer.
J’arrive au niveau d’une forêt. Je quitte la route pour rejoindre un chemin spongieux qui longe la forêt. Floc, floc : je patauge dans l’eau. Heureusement, le chemin débouche rapidement au pied d’une falaise que je vais suivre tout du long.
Une fois au bout, je me retrouve au milieu d’une vaste étendue verte, parsemée de collines de-ci, de-là…
… et surtout avec les Red Cullins en ligne de mire. Je m’arrête et je savoure…. Je crois que c’est l’une des plus belles étapes depuis le début… Ceci dit le ciel bleu y contribue aussi pour beaucoup.
Un peu plus loin, alors que je me rapproche de la route, c’est Blàbheinn qui apparaît. Mais la belle est cernée par les nuages…
Ce n’est pas gagné pour demain… Du coup, je décide de ne pas bivouaquer près du parking, au départ de l’étape pour monter au sommet. Je vais plutôt continuer jusque Torrin et si vraiment le temps tourne au beau demain, alors que reviendrai un peu en arrière pour faire l’ascension.
Je traverse une nouvelle forêt. Je fais une pause de quelques minutes car je commence à fatiguer. J’ai mal aux pieds ! Je repars et arrive ensuite au parking de Blàbheinn. Je fais le tour pour voir si je trouve un endroit sympa où me poser pour déjeuner. Beaucoup de voitures sont garées, on dirait qu’il y a du monde qui est parti à l’assaut de la montagne aujourd’hui, malgré les nuages au sommet. Je ne trouve pas d’endroit qui me plaise pour déjeuner. Je reviens alors un peu en arrière pour me poser au bord de la rivière. J’en profite aussi pour remettre un peu de crème solaire car le soleil tape pas mal.
Après le déjeuner, je repars le long de la route. C’est long et monotone. Cette partie du parcours n’a vraiment aucun intérêt selon moi et n’est pas très agréable. Heureusement, on peut se décaler de la route et marcher sur le bas-côté. Tant mieux car la route est assez passagère.
En chemin, je regarde un peu partout autour de moi pour repérer les endroits où je pourrais bivouaquer. Pas mal de possibilités à gauche, au pied des montagnes. Mais c’est vraiment trop proche de la route, pas assez tranquille à mon goût. Je préfère donc continuer et j’envisage même d’aller au début de l’étape suivante, en bord de mer. La seule inconnue, c’est l’eau. Je ne suis pas certaine d’en trouver là-bas.
J’arrive à l’entrée du village de Torrin. Là, un petit café le Blue Shed Café. Je pose mon sac sur la terrasse et je rentre commander à l’intérieur. Un thé et un gâteau, comme hier à Elgol. J’adore ces villages écossais où il n’y a rien, pas de shop pour se ravitailler en tant que tel, mais où il y a toujours un petit café avec des gâteaux faits maison pour se faire un goûter. Le top après une bonne journée de marche.
La serveuse m’apporte ma commande sur la terrasse.
Elle me demande si je fais le Skye trail et si je le commence ou si je le termine. On parle de tout, de rien, de la météo qui, me dit-elle, semble s’être remise au beau aujourd’hui. Certes mais je lui fais remarquer que quand j’ai commencé à marcher, au nord, ce n’était pas du tout la même ambianc. Elle me demande si je campais quand il y a eu cet orage… Décidément, il semble avoir marqué les esprits de tout le monde ici ! Je lui demande si elle sait quelle sera la météo de demain. Non mais les gens à la table d’à coté entendent notre conversation et me disent que ce sera un peu moins ensoleillé qu’aujourd’hui mais beau quand même. Bonne nouvelle ! Ça me laisse encore un petit espoir pour Blàbheinn.
Je repars et alors que je quitte la terrasse, une femme me demande combien pèse mon sac. Je ne sais pas trop. 17 ? 18 ? Un peu moins de 20kg je pense. « Quelles vacances ! » me répond-elle. J’avoue que sa réponse me scotche tellement que je reste sans voix. Que répondre à ça… Elle ne peut visiblement pas comprendre que ça me plait de porter mon sac et de voyager à pied, en itinérance. Vite, repartir dans ma campagne, seule.
En sortant du parking du café, je remarque un panneau avec une pierre pendue dessus. Cette pierre donne la météo et le panneau explique comment… « Si la pierre est mouillée : il pleut » ; « Si la pierre est sèche : il ne pleut pas » ; etc. C’est assez drôle et bien trouvé pour résumer la météo en écosse.
Je continue le long de la route et je me dirige vers la sortie du village. Je reste vigilante et je regarde partout pour voir si je ne trouve pas un endroit où bivouaquer. A la sortie du village, je pense continuer jusqu’à la côte pour bivouaquer face à la mer. Il n’y a pas de vent, cela ne devrait pas poser de problème.
A ce moment, une voiture s’arrête. C’est la femme qui s’est inquiétée du poids de mon sac. Elle me demande si je veux qu’elle me dépose quelque part. A vrai dire, je ne dirais pas non… mais je ne sais pas trop où je vais. Du coup, je refuse en expliquant que je suis presque arrivée, ce qui n’est pas complètement faux… enfin, je pense ?
Je continue à suivre la route, ça commence à devenir un peu dur. Je fatigue. Je commence à regretter d’avoir dit non… J’aurais pu lui demander de me déposer à l’intersection de la route qui mène à la plage…
La route continue à travers une petite forêt. Je me dis que ce serait top de trouver un endroit au milieu de ces petits arbres pour planter la tente… J’arrive dans un virage, près d’un cattle grid. Là, un bruit attire mon attention. Je tends l’oreille… C’est un bruit d’eau. Je tourne la tête et j’aperçois un ruisseau. Je m’approche, il s’enfonce dans la forêt… Je m’avance un peu et là, je découvre une mini-clairière… Sympa ! Mon vœu serait-il exaucé ? Le problème, c’est que c’est peu trop proche de la route à mon goût. Je remonte un peu plus loin, au milieu des arbres. Et là, un peu plus haut, j’arrive dans une autre petite clairière. Avec un espace plat près de la rivière, prêt à accueillir ma tente. La route est plus loin, je l’entends beaucoup moins et cela devrait encore se calmer en fin de journée. Je pose mon sac, je m’assois par terre. C’est ici que je veux rester cette nuit, c’est sûr. Je plante ma tente.
Une fois que c’est fait, je vais me laver dans la rivière : le bonheur !!!! Personne autour, je suis complètement isolée avec les arbres. Je me pose au milieu du ruisseau. Le soleil chauffe encore bien, c’est le bain rêvé !
J’en profite aussi pour laver mon sur-pantalon. Depuis plusieurs jours, je marche avec, avec juste un collant en-dessous. Dans ces chemins aussi détrempés, c’est la meilleure solution que j’ai trouvée. Sauf que là, il est complètement crotté ! Une bonne lessive s’impose avant de continuer !
Je me pose ensuite pour regarder la carte et étudier l’étape de demain au cas où l’ascension de Blàbheinn ne soit pas possible. Dans ce cas, je diviserai l’étape en deux. Car pour mon arrivée à Broadford, j’ai réservé un logement. Enfin, une roulotte. Bref, j’en reparlerai. Mais ma réservation commence le 24. Et je ne me vois pas bivouaquer aux portes de la ville. De mémoire, quand nous sommes passés en bus, cela ne m’a donné plus envie que ça.
J’entends bouger dans les fourrés, de l’autre coté de la rivière. Je tourne la tête : des moutons… Après le troupeau de vaches ce matin, il ne manquerait plus que je me réveille au milieu d’un troupeau de mouton. L’un d’entre eux s’aventure près de la rivière. Je sors de la tente, il me voit et détale en courant. Finalement, je pense que le risque d’être envahie par les moutons est faible.
Je peux dormir tranquille…