Au réveil, je ne me fais pas trop d’illusion sur le programme de la journée : il pleut des cordes et le brouillard est toujours là. Je passe quand même voir Gavin qui me confirme que la météo n’est pas bonne pour aujourd’hui. Moins de vent mais de grosses pluies et beaucoup de brouillard. Voilà qui met fin à mes espoirs de bivouac sur le ridge et qui va m’obliger à modifier mon parcours.
Je décide de partir quand même pour le Quiraing, de faire au moins le début de l’étape puis de revenir à l’auberge de jeunesse ce soir. Je demande à Gavin et Annabelle s’il leur reste un lit. La réponse est oui ! « You are lucky again » me dit Annabelle. Je dois juste changer de chambre et passer de la 39 à la 38.
Je monte tout de suite déplacer mes affaires et je croise Stephan en chemin. Nous discutons de notre programme de la journée. Lui aussi part dans le Quiraing mais au lieu de faire demi-tour et de revenir sur ses pas, il envisage de couper à travers champs et aller jusque Uig. Là, il prendra un bus pour rentrer à Flodigarry. Mais c’est le seul bus de la journée, à 15h30. Je ne sais pas encore si je vais faire pareil mais nous décidons de partir ensemble.
Départ sous la pluie et dans le brouillard. Nous suivons le petit chemin qui serpente au milieu des montagnes, ou plutôt de leurs fantômes. Ça a l’air superbe… mais il nous faudra un peu d’imagination pour «voir » à travers le brouillard.
Le chemin monte encore un peu et passe au pied de grandes parois…
Il est parfois étroit mais cela ne pose pas de problème. Seule une descente sera rendu délicate à cause de la pluie
De temps en temps, les nappes de brouillard se dissipent légèrement pour laisser apparaître un bout de vallée ou encore un lac… Suffisamment énigmatique pour me donner envie de revenir…
Nous sortons du Quiraing et arrivons à un parking, au pied du Trotternish ridge. Il y a toujours autant de brouillard… J’hésite d’abord à continuer sur le ridge mais finalement je continue. Nous allons aller au moins jusqu’au “camping” que Gavin m’avait indiqué et nous bifurquerons ici pour rejoindre Uig et prendre le bus. Si vraiment la météo empire, alors nous ferons demi-tour.
Nous nous remettons e marche et longeons le ridge pendant 10km. Quelques moutons croisés de-ci de-là nous tiennent compagnie. De la vue, nous ne verrons pas grand-chose… même si les falaises surgissent parfois, au détour d’une barrière.
Ici, pas de chemin marqué, peu de traces, si ce ne sont celles des moutons. Il faut suivre le ridge. C’est facile par temps clair, plus compliqué avec le brouillard et dès lors qu’on s’éloigne un peu du bord des falaises. Je sors parfois le GPS pour nous recaler.
Coté terrain, c’est pour le moins humide : le sol est spongieux, l’herbe est gorgée d’eau. Celle-ci affleure le sol et je m’enfonce plus d’une fois jusqu’aux chevilles.
Petite pause pour checker la carte et repérer sur mon GPS l’endroit où nous sommes et celui où nous devons bifurquer pour rejoindre Uig. Nous ne sommes plus très loin. A cet endroit, nous sommes censés trouver une rivière et la longer jusqu’à un chemin qui nous mènera à Uig. C’est aussi à cet endroit que j’avais prévu de bivouaquer. Et nous y sommes. C’est bien sympa en effet mais je n’ai aucun regret : le vent souffle et on ne voit toujours pas grand-chose avec ce brouillard.
Nous partons à la recherche de la rivière. Le sol est aussi humide : de grandes herbes, de la mousse, l’eau qui affleure sur le sol… J’ai beau chercher les meilleurs endroits pour poser les pieds, je ne trouve pas grand-chose et je me retrouve vite avec les chaussures mouillées. Donc rapidement, je ne me pose plus trop de question : j’avance sans me soucier du terrain !
Il me semble entendre un bruit d’eau… Je tends l’oreille… Je suis la direction et nous arrivons à la rivière. Il y a donc bien de l’eau à proximité du ridge ! C’est bon à savoir car toutes les informations que j’avais trouvées disaient qu’il n’y en avait pas et qu’il fallait prévoir 2 jours d’eau si on souhaitait bivouaquer ici.
Nous suivons la rivière jusqu’au chemin. Complètement hors sentier, parfois au travers de grandes herbes. Coté timing, nous sommes juste. Très juste même… D’après la carte, il nous reste encore un peu trop de distance à parcourir par rapport au temps qu’il nous reste pour attraper le bus : 45 minutes. Le compte à rebours est lancé.
Nous accélérons le pas et avalons les km, jusqu’à arriver à une rivière qui traverse le chemin. Rivière trop importante pour la traverser à pied. Nous cherchons un passage, un endroit où il y aurait des pierres sur lesquelles sauter pour éviter de se déchausser. Mais nous ne trouvons rien. Tant pis. Le temps nous manque et les minutes sont précieuses. Nous traversons avec les chaussures. Peu m’importe d’avoir les pieds mouillés, l’important est d’avoir notre bus. Dommage, jusqu’ici mes chaussures avaient tenu le coup et j’avais encore les pieds au sec. S’en est terminé maintenant.
Nous accélérons encore un peu plus le pas. En dehors de la distance qui nous sépare encore de Uig, nous ne savons pas où se trouve l’arrêt de bus. J’imagine que ce n’est pas une grande ville mais nous n’aurons vraiment pas le temps de chercher. Optimiser…
Nous arrivons aux portes de Uig. Il nous reste une dizaine de minutes… Un peu plus loin, un arrêt de bus. Mais nous ne savons pas du tout de quel arrêt il s’agit… Ce n’est pas très clair, il n’y a aucun nom. La fiche avec les horaires semblent indiquer qu’il s’agit de « Police station », l’arrêt que nous cherchons. Ceci dit, nous ne voyons aucun poste de police dans les parages… Du coup, nous hésitons entre rester ici et attendre ou bien continuer la route et chercher un peu plus loin. Le bus est censé passer dans quelques minutes… Finalement, nous partons en direction du centre-ville, mais rapidement nous checkons la carte en quête d’indices. A priori, l’arrêt de bus que nous cherchons n’est pas très loin de l’endroit où nous étions. Nous levons la tête de la carte… Et à ce moment, nous apercevons en face, sur la route, le bus qui arrive. Nous piquons un sprint pour retourner là où nous étions avant. Stephan me devance, je le vois disparaître dans le virage juste après le bus, je me dis que c’est bon et qu’il est arrivé à temps. Mais quand j’arrive, pas de bus. Stephan a eu beau lui faire de grands signes, il ne s’est pas arrêté… Juste derrière lui, dans le virage, le poste de police. Nous sommes donc passés devant sans le voir.
Voilà, nous avons loupé le seul bus de la journée. Ça se complique… Il y a deux solutions ; soit nous entrons à pied mais nous en avons pour 3 bonnes heures minimum ; soit nous tentons le stop. Nous choisissons la seconde option. D’abord, nous vérifions que nous sommes bien sur la bonne route. Je demande à une jeune fille qui passe pour en être sûre. Nous sommes bien au bon endroit. Nous nous mettons en place. Bien sûr, il s’est remis à pleuvoir et nous sommes vite trempés. Voilà qui ne va pas nous faciliter la tâche…
Quelques voitures passent et finalement, peu de temps après, une voiture s’arrête. Un couple de personnes âgées fort sympathique. Lui est allemand, elle américaine et ils font le tour de l’île en voiture. Nous leur demandons s’il peuvent nous avancer un peu. Mais après avoir jeté un œil à leur carte, ils nous confirment que Flodigarry est bien sur leur route et nous proposent de nous déposer à l’auberge de jeunesse. On ne pouvait rêver mieux !
Arrivée à l’auberge de jeunesse, je me pose et j’étudie le programme de demain. Vais-je pouvoir reprendre le Skye trail ? La météo devrait s’améliorer doucement mais elle restera encore très moyenne demain. J’abandonne l’idée de terminer l’étape sur le ridge. Je prendrai le bus jusqu’au Old Man of Storr pour ensuite longer la côte jusque Portree. Je vise le bus de 11h19.
Ce soir, pour la première fois, les nuages se dissipent un peu et nous pouvons apercevoir les montagnes des Highlands depuis la fenêtre.
Je termine la soirée en jouant au UNO avec Stephan et un groupe de jeunes allemands. Nous enchaînons les parties. Au final, je termine première ex-aequo avec l’un des allemands. Notre gain ? Le droit de nous faire préparer le petit-déjeuner demain matin !